Ce portail est conçu pour être utilisé sur les navigateurs Chrome, Firefox, Safari et Edge. Pour une expérience optimale, nous vous invitons à utiliser l'un de ces navigateurs.

 « A la loupe » (2016)

Les archevêques de Besançon

Le texte a été écrit vers 1600, c'est une liste des archevêques de Besançon jusqu'en 1586, avec des lettrines enluminées (Ms 695).​ Attention, le style est hagiographique et il peut y avoir aussi des inexactitudes historiques. L'auteur du manuscrit remplace ce qu'il ne connaît pas sur les archevêques par des actions caractéristiques de saints chrétiens, surtout pour les premiers archevêques qui sont tous assimilés à des saints. 

Lettrine décorée (Ms 695, f. 89v°)

Saint Prothade est le modèle du bon archevêque : « toutes et quantes fois qu'il prévoyait quelque calamité future sur le peuple, à raison de leur péchés, il commandait les jeûnes et processions, auxquelles il assistait à pieds nus, portant les châsses des glorieux martyrs sur ses tendres épaules ».

On sait peu de chose sur la vie de saint Prothade, sauf qu'il a participé au concile de Paris en 614 sous le roi mérovingien Clotaire.​

- L'image à la loupe

- L'image à la loupe : Lettrine décorée

Femme jouant du luth (f. 1)

La liste des archevêques de Besançon débute avec le légendaire saint Lin, qui aurait été archevêque de Besançon vers l'an 300. Le modèle est en fait saint Lin, le deuxième pape après saint Pierre. A Besançon, il est censé avoir bâti la première église Saint-Etienne, à l'emplacement de la cathédrale.​

Le récit explique que saint Lin se heurte à la religion officielle romaine et finit décapité, sans avoir pu convertir beaucoup de Bisontins ; les missionnaires suivants non plus : « mais comme le peuple estoit de dur cerveau, ilz ne le peuvent convertir sinon avecques grandes successions de temps. »​

Les illustrations des lettrines sont plus en rapport avec la la mythologie, ou la vie quotidienne de la fin du XVIe siècle, qu'avec les archevêques.

- L'image à la loupe

- « Le peuple était de dur cerveau » (f. 2v°)

Lettrine du 2e archevêque

Les véritables fondateurs de l'église de Besançon sont saint Ferréol et saint Ferjeux, venus de Lyon. Le récit de leur martyre en 276 est mouvementé, comme il se doit :

« enflé de grand despit ledit Claudius, il leur fit coupper les langues, mais (cas admirable et grand) que pour ce ils ne perdirent la parolle, ains plus vivement se prindrent à prescher Jesu Christ, disant audict Claudius misérable tyran, que tous tes dieux ne pourraient faire parler un homme sans langue. »​

Claudius les fait alors décapiter, mais les deux saints sont encore capables de marcher avec leur tête sous le bras!

Ils parlent encore sans leur langue ! (f. 4)

Femme se suicidant (f. 11)

C'est un siècle plus tard que le culte des deux martyrs commence à Besançon, selon le récit de la vie du 8e archevêque, saint Aignan (mort en 374) :

« Un tribun romain, commis pour garder la cité, eut fantaisie d'aller à la chasse, auquel se présenta un renard qui à la poursuite de ses chiens se sauva en un trou, ce qu'ayant aperçu le tribun, il employa tant plus absolument à la poursuite de sa proie (mais destiné à une meilleure), manda quérir en la cité pigasses et fosseurs pour parvenir à son renard, mais en fouissant que l'on faisait, l'on va trouver deux corps ayant alentour de leurs têtes de grands clous fichés à force de marteaux, ainsi comme couronnes d'épines. »​

Des têtes plantées de clous ! (f. 4)

Hercule (?) (f. 16v)

Sous le 14e archevêque saint Célidoine (417-451), a lieu une opération de division de reliques de saint Etienne au profit de l'empereur Théodose, qui permet aussi un échange d'autres reliques :

« C'estoit la volonté de Dieu qu'elle fussent divisées, icelui Celidonius a ce moyen prenant des tenailles de maréchal, vint à étendre ces os sacrés, desquels tout aussitôt il va issir (sortir) et ruisseler grande abondance de sang (…) comme si le bras fut été extirpé chaud. »​

 

C'est le signe que ces reliques sont authentiques.

Selon le manuscrit, saint Célidoine a été déposé en 444 par Hilaire d'Arles​ parce qu'il était marié à une femme veuve, puis rétabli par le pape Léon ; il a été tué lors d'un siège de Besançon par les Huns (451​).

Des reliques miraculeuses (f. 16v°)

Vieillard (f. 24)

Saint Donat de Besançon (627-658) succède à saint Prothade, il est un disciple de saint Colomban (543-615). Celui-ci fonde le monastère de Luxeuil en 590, puis est assigné à résidence à Besançon en 610 par le roi Thierry II.

Saint Donat ​vient d'une grande famille, son père est le duc Wandalenus (Waldelène) et sa mère Flamia (Flavie). Il bâtit l'église Saint-Paul « hors des murs » (monastère fondé vers 625-630), et fonde avec sa mère le monastère Sainte-Marie (Jussa-Moûtier, ou « monastère d'en-bas »)​.

L'image à la loupe

Angelot (f. 27)

Saint Claude (685-692) est fils des comtes de Salins : « Nonobstant qu'il porta les armes jusquez au vingtième an de son âge, si n'ouyt oncques personne sortir de sa bouche paroles confuses ou lascives. »​

Il est chanoine à Besançon de l'âge de 20 ans à 32 ans​, puis archevêque pendant sept ans (626-633)​​ : « Mais comme le clergé et le peuple s'estoient congrégés pour faire prière à Dieu sur l'élection d'un archevêque, une voix du Ciel fut ouye de tous, que saint Claude en estoit très digne. »

Il se retire ensuite dans un monastère bénédictin du Jura (aujourd'hui la ville de Saint-Claude). Il y est enseveli, et un pèlerinage se met en place pour perpétuer son souvenir.

L'image à la loupe

Vieillard triste (f. 35v°)

Bernoin (811-829​), nommé Germinius dans le manuscrit, reconstruit la cathédrale et la renomme ​Saint-Jean-Baptiste. Le nouveau bâtiment se superpose à Saint-Etienne et Sainte-Marie, ce qui explique la présence inhabituelle de deux autels, un à chaque extrémité. La cathédrale a été consacrée lors de la fête de Pâques, la plus importante de l'année, ce qui nous donne la date du 21 avril 819.

En 821, une lettre ​de Louis le Débonnaire à l’archevêque Bernoin désigne Besançon sous le nom de « Chrisopolis » ​ou « ville d’or », selon la mode des noms grecs​ à l'époque.

L'image à la loupe

Homme (f. 39)

Ce nom de Besançon est utilisé du IXe au XIe siècle ; on le retrouve sur les monnaies « estévenantes » (avec le bras de saint Etienne), frappées par l'archevêque Hugues de Salins au XIe siècle. Il s'agit sans doute d'un jeu de mot avec la monnaie d’or de Byzance (besan d’or) : « besan sum », « je suis un besan »​, c'est-à-dire Besançon, la ville des besans.​

Hugues Ier de Salins (1031-1066​, nommé ici Hugo) achève l'église Saint-Etienne sur le mont (à l'emplacement du front Saint-Etienne, la première entrée de la citadelle). L'église est consacrée en 1050 par le pape ; détruite par Vauban, il en reste la belle rose en marbre à la cathédrale.

Hugues de Salins obtient son indépendance politique de la part de l'empereur, contre le comte, et devient le seigneur de Besançon avec le droit de frapper monnaie. Il crée plusieurs églises à Besançon, dont la Madeleine.

L'image à la loupe

Ansericus (f. 46)

Le prestige de la nouvelle église Saint-Etienne explique la concurrence qui s'installe avec la cathédrale Saint-Jean au sujet de l'élection de l'archevêque. Celui-ci est élu par le chapitre (l'assemblée des chanoines), et non plus par le peuple (l'assemblée des fidèles). Mais par le chapitre de Saint-Jean ou celui de Saint-Etienne? Celui-ci joue sur le premier nom de la cathédrale de Besançon pour prétendre être l'église la plus ancienne.

Ce conflit dure et s'envenime, au point que l'archevêque Guillaume d'Arguel​ doit démissionner en 1116 pour protester contre une décision injuste du pape, qui choisit Saint-Etienne. Le pape suivant casse cette décision en 1121, en faveur du nouvel archevêque Anseric (Anseri, 1117-1134). Il s'agit du pape Calixte II, originaire de Franche-Comté, dont le frère Hugues a été archevêque de Besançon (Hugues III).

L'image à la loupe

Vieillard (f. 54v°)

Le pouvoir des archevêques sur la ville cesse avec la reconnaissance officielle de la commune en 1290, qui est l'aboutissement d'une lutte acharnée. L'archevêque Eudes de Rougemont (Odo, 1269-1301) possède un château à Rosemont, qui est pris d'assaut et détruit par les habitants de la ville en 1291.

Le manuscrit retrace le récit de cette bataille, et explique comment les habitants ont su éviter de garder prisonnier l'archevêque : « on le laissa échapper faisant semblant de non le connaître »​.

L'image à la loupe

Femme et enfant (f. 74v°)

Charles de Neufchâtel (1462-1498) est élu à 21 ans grâce à des appuis politiques, son père reste administrateur de l'archevêché jusqu'à ses 27 ans. Pour sa prise de fonction, il est accueilli devant la porte de Battant par les habitants, et jure de respecter les  « franchises de la cité » (l'indépendance de la commune).

« Il redressa par après l'ordre des bréviaires et feit des statutz pour le règlement de son clergé. » ​La bibliothèque conserve un bréviaire manuscrit enluminé (Ms 69) et un pontifical imprimé à Salins (livre liturgique destiné à l'archevêque).

Ce que le manuscrit ne raconte pas, c'est que l'archevêque doit fuir Besançon en 1478, pour avoir pris le parti du roi de France Louis XI qui avait tenté d'envahir la Franche-Comté après sa victoire sur Charles le Téméraire. L'archevêque devient conseiller de Louis XI qui le nomme évêque de Bayeux (1480)​, afin de lui garantir des revenus. C'est à Rouen qu'il fait réaliser le beau bréviaire enluminé, qu'il destine à son diocèse de Besançon ; de leur côté, les chanoines lui restent fidèles et il reste archevêque de Besançon jusqu'en 1498.

L'image à la loupe

Ange (f. 88)

Le cardinal Antoine de Granvelle (1585-1586), devient archevêque de sa ville natale la dernière année de sa vie, après avoir mené une brillante carrière ecclésiastique et politique au service des rois d'Espagne Charles Quint et Philippe II.

Alors évêque d'Arras, il avait essayé d'étouffer par la force la révolte des protestants aux Pays-Bas contre l'Espagne, mais avait dû fuir devant eux, en abandonnant une partie de ses collections de livres et d'oeuvres d'art, « s'estant icelluy des Pays-Bas retiré à Rome à cause des tumultes et brouillats esquels il voyait le pays s'enfondrer. »​

 

C'est ce qui restait de cette collection de livres et d'oeuvres d'art, avec les archives diplomatiques des Granvelle, qui est recueilli par l'abbé Boisot au XVIIe siècle et qui forme le noyau de la bibliothèque publique de Besançon fondée en 1694.

Philippe II, « considérant assez l’importance du cerveau dudit cardinal, constitua icelluy vice-roy au royaume de Naples », avant de le rappeler à Madrid à la fin de sa vie.

L'image à la loupe

Bibliographie

Retour vers la page « A la loupe » 

Retour vers la page d'accueil de Mémoire vive

Ce site utilise des cookies techniques nécessaires à son bon fonctionnement. Ils ne contiennent aucune donnée personnelle et sont exemptés de consentements (Article 82 de la loi Informatique et Libertés).

Vous pouvez consulter la politique de confidentialité sur le lien ci-dessous.