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 « A la loupe » (2021)

La lecture en images : du Moyen Age à la Renaissance.

Ms 138

De nombreuses figures de lecteurs apparaissent dans les collections de la Bibliothèque d’étude : dans les enluminures des manuscrits médiévaux, les dessins et les estampes, les livres imprimés et les journaux. 

Ils appartiennent à leur époque : leurs postures, les textes qu'ils explorent, connaissent ou revendiquent sont différents.

Religieux, laïcs, princes, nobles, citadins, villageois... ils ne découvrent pas la lecture en même temps et ne lisent pas toujours pour les mêmes raisons. 

Esquissons une brève histoire de la lecture à travers les images de la Bibliothèque ! 

L'image à la loupe

Ms 166

Au Moyen Age, une infime partie de la population sait lire et écrire. Certains clercs et membres de la noblesse sont lettrés. La langue dominante de la culture écrite est le latin.

Cette lettrine tirée d'un manuscrit de théologie (Ms 166, 1457) entoure un évêque de profil. Il tient dans ses deux mains un livre fermé, sans doute un livre saint. 

La transmission des connaissances et des histoires se fait surtout par la parole, et le livre en tant que support n'est pas toujours présent. Il est même absent de la majeure partie des foyers dans les villes et les campagnes. 

L'image à la loupe 

Ms 138

La lecture est intimement liée à la pratique religieuse. Le prêtre ou l'évêque lit les textes liturgiques à haute voix lors des offices. L'assemblée découvre les textes sacrés par l'écoute. La lecture s'effectue debout et s'inscrit dans une pratique collective. 

L'image à la loupe

Ms 140

Les chantres font entendre la parole divine pendant la messe. Ils chantent ici en choeur. L'un d'entre eux porte des bésicles, lunettes sans branches fixées au-dessus du nez.

Les lunettes seraient apparues en Europe au XIIIe siècle.  Le moine anglais Roger Bacon aurait employé des verres pour agrandir les lettres. Son invention aurait ensuite été réalisée et diffusée en Italie. 

Ces premières lunettes devaient être d'un grand secours pour la lecture et la copie des manuscrits, travail long et minutieux. 

L'image à la loupe

Ms 434

Au Moyen Age, les rois et les princes commandent des livres pour leur apprentissage. 

 La bibliothèque de Besançon conserve un manuscrit remarquable, Traités philosophiques et moraux (Ms 434), composé de neuf traités philosophiques commandés par le roi de France Charles V. 

Il les fait copier en 1372. Ce manuscrit est richement enluminé (49 enluminures de la main de différents artistes). C'est un trésor commandé pour enrichir la bibliothèque royale. 

Le roi est représenté dans de nombreuses miniatures, ici écoutant la messe et se recueillant sur le texte saint. 

L'image à la loupe 

Ms 434

Pour apprendre à être un bon prince chrétien, juste et pieux, le roi est instruit en écoutant la lecture de "l'Enseignement des princes" de Guillaume Perrault , le "Livre des moralités" (des philosophes), les "Fables" d'Esope... 

Ces traités sont traduits du latin vers le français. 

Au Moyen Age, les seigneurs ne savent pas tous lire, c’est parfois un clerc qui leur fait la lecture. 

Dans les universités, surtout à partir du XIIIe siècle, la lecture s'épanouit pour l'apprentissage. Le cours du professeur consiste en une lecture publique. Les étudiants suivent le texte sur leurs propres livres. 

L'image à la loupe  

Ms 159

La lecture à haute voix au Moyen Age laisse tout de même de la place à la lecture murmurée ou silencieuse. Cette dernière s'affirme surtout à partir du XIIe siècle. 

Les clercs vivant en communauté doivent garder le silence. Un seul moine fait la lecture pendant le repas (règle de Saint Benoît). Ils pratiquent cependant une lecture individuelle et silencieuse. 

Dans cette enluminure du Ms 159 (Oraisons en français et en latin), Saint Benoît est absorbé dans une lecture contemplative, spirituelle.  

L'image à la loupe

Ms 159

Dans nos manuscrits, le livre est l'attribut de nombreux saints. Ils semblent inciter les chrétiens à pratiquer une lecture individuelle de dévotion.  

Ici Saint Laurent (Ms 159) ne tient pas seulement le gril, symbole de son martyr, mais présente le livre face à celui qui parcourt le manuscrit, comme une invitation à entrer lui aussi dans le texte saint, à connaître la parole de Dieu pour son salut. Il est dans une posture d'évangélisation. 

L'image à la loupe

Ms 159

La lecture personnelle et silencieuse est pratiquée chez certains nobles, qui peuvent posséder des livres de piété ou des livres d'heures, destinés aux laïcs.  

 

Une figure de lectrice apparaît souvent dans les livres d'heures de la fin du Moyen Age : la Vierge. Au moment de l’Annonciation, elle est à son pupitre, plongée dans un livre de prières, lorsque l’ange Gabriel surgit. 

Ici Sainte Anne lui apprend à lire en lui tendant le livre. 

L'image à la loupe 

Ms 127

Dans ce livre d'heures, la Vierge ressemble à une dame de la noblesse pratiquant une lecture personnelle, méditative, dans ses appartements. Elle se tient dans un intérieur confortable avec des meubles sculptés et de riches tissus. 

Ce livre d'heures à l'usage de Besançon a été réalisé par un atelier flamand en 1540 pour Marguerite d'Achey, sœur du cardinal Antoine de Granvelle. Certaines grandes dames pratiquent une lecture spirituelle et se voient offrir des manuscrits précieux, ornementés pour elles. 

Le livre d'heures connait un véritable engouement au XVe siècle. Les bourgeois souhaitent également en posséder un car, enluminé, il est un objet de prestige.  

A la fin du Moyen Age, la lecture dévote est toujours dominante. Dans les villes, l'alphabétisation s'est développée aussi, notamment chez les commerçants et les juristes, qui lisent pour leurs affaires. 

L'image à la loupe 

Psalterium, Antuerpiae : Ex Officina Christoph. Plantini, Regii Prototypographi., 1571 - EST.FC.1912

Au Moyen Age, le livre est copié à la main et ses exemplaires peu nombreux. La naissance de l'imprimerie bouleverse cela : le nombre de livres va se démultiplier. 

Les laïcs accèdent plus facilement au livre. Ils peuvent comprendre la Bible, traduite en de nombreuses langues (français, allemand, anglais...). Livres religieux, manuels scolaires, recueils de poèmes, romans, des textes très différents sont diffusés plus largement, ce qui encourage l'apprentissage de la lecture.  

A la Renaissance, l'imprimerie favorise la propagation des idées des humanistes. Pour eux l'éducation est essentielle et se construit sur l'étude. Et l'étude est bâtie sur la lecture et la recherche dans les textes. La bibliothèque devient essentielle.   

L'image à la loupe

EST.FC.1920

Sur ce portrait d'Antoine de Granvelle  (1517-1586), nous comptons des livres parmi les attributs de l'encadrement allégorique. Cardinal, diplomate, Antoine de Granvelle était aussi un bibliophile et un grand collectionneur. Les livres incarnent sur cette gravure son statut social élevé. 

Antoine de Granvelle possédait plusieurs bibliothèques, constituées de manuscrits médiévaux, de reliures précieuses (italiennes ou parisiennes) et d'objets d'art. Il a également rassemblé, à l'image de son père Nicolas de Granvelle, la correspondance et les papiers d'Etat en rapport avec ses fonctions politiques. 

Polyglotte, il pratiquait à la fois une lecture érudite et une lecture liée à l'exercice du pouvoir, aux affaires d'Etat.

L'image à la loupe

EST.FC.1711

Cette estampe nous fait pénétrer dans le cabinet de travail d'un grand humaniste, Erasme. Il est assis face à son secrétaire particulier Gilbert Cousin, originaire de Nozeroy. Erasme et Cousin semblent échanger autour de leurs lectures. Cousin fait des annotations. Ils sont confortablement installés dans des fauteuils à hauts dossiers, les ouvrages qu'ils étudient surélevés sur des lutrins. Derrière Cousin, une bibliothèque est chargée de livres aux formats divers, certains petits et faciles à emporter, d'autres très volumineux. 

A la Renaissance, les humanistes sont de grands lecteurs et cherchent à revenir à la source des textes grecs et latins. Erasme publie en 1516 une édition grecque du  Nouveau Testament (pour s'éloigner de la Vulgate, la traduction latine de la Bible). Il souhaite également que la Bible soit traduite en langues vernaculaires, pour que la révélation de la parole divine soit accessible aux laïcs. 

Les humanistes pratiquent des lectures variées, mêlant lecture savante et lecture des poètes, des meilleurs auteurs anciens et modernes. Ils s'approprient les textes par des annotations. 

 L’image à la loupe  

Un imprimé de 1588 conservé à la Bibliothèque d’étude présente une étonnante et ingénieuse machine pour faciliter la lecture : une « roue à livres ». 

Dans Le Diverse et artificiose del capitano agostino ramelli dal Ponte della Tresia (BM 11461), une machine « fort utile et commode à toute personne qui se délecte à l’étude » permet à un lecteur souffrant de lire sans avoir besoin de bouger ou de se lever pour changer de volume. Un système d'engrenages fait pivoter la roue supportant les livres posés sur des tablettes, sans risque qu'ils tombent. Le lecteur assis peut ainsi passer d’un livre à l’autre, annoter dans les marges.  

L’auteur précise qu’on peut réaliser de grandes comme de petites roues à livres. Un certain confort est recherché ici pour la lecture. Les livres au XVIe siècle pouvaient être très lourds. 

Cette machine est tout à fait adaptée à la lecture d'un humaniste car elle permet de comparer des textes, de les mettre en miroir et de les collationner. 

Cette machine ne fut jamais construite à l'époque de l'ingénieur italien Ramelli. Des étudiants américains de l'Institut de technologie de Rochester, dans l’État de New York, l'ont réalisée en 2018. 

L'image sur Gallica

Les roues à livres de l'Institut de technologie de Rochester sur Actualitté 

Sources

Michel Vernus, Histoire d’une pratique ordinaire : la Lecture en France, Éd. Alan Sutton, 2002, BM 329851  

Alberto Manguel, Une histoire de la lecture, traduit de l’anglais par Christine Le Bœuf, Actes Sud, 1998

« Lire dans l’espace intime, dans l’espace public : les représentations du livre du Moyen Âge au XIXe siècle », Exposition du mardi 11 juillet au samedi 12 août 2017 à la Bibliothèque Municipale de Besançon 

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